Il est souvent difficile de prédire l’issue d’une thérapie comportementale.
De multiples facteurs interviennent et seront déterminants, pour la réussite ou non, des protocoles mis en place.
La capacité du chien à évoluer par exemple, le degré d’ancrage de son trouble de comportement, les moyens (temps, matériel…) pouvant être mis en œuvre par ses propriétaires…
C’est pour ces différentes raisons que la résolution d’une problématique entraînant l’épanouissement de l’animal et de son humain, reste toujours un moment un peu à part.
Celui qui motive à continuer d’exercer ce métier…
Junior, magnifique beauceron de 45 kg, adopté après avoir été « réformé » de son élevage à l’âge de 4 ans, est venu habiter en ville, après avoir grandi dans un élevage rural hypo stimulant.
C’est à dire, un élevage ne lui permettant pas de développer une familiarisation aux différentes stimulations que peut provoquer un environnement urbain (humains, voitures, bus, camions, vélos, bruits de chantiers…).
Aussi, son adoption tardive n’a pas amélioré les choses.
En effet, chez le chiot, le fait de passer la période de socialisation, période où la curiosité de l’animal l’emporte sur ses peurs (entre les 21jours et les 12 semaines du chiot) dans un environnement pauvre en stimulations sensorielles, peut grandement altérer son processus de développement, et sa capacité à faire face à de nouvelles situations.
Très méfiant envers les inconnus venant au domicile, ayant du mal à explorer son propre foyer, le stress était partie intégrante du quotidien de Junior, et ce, malgré toute l’attention et l’amour que lui portaient ses propriétaires.
Mais c’est le déroulement des promenades en ville qui était sans doute la problématique la plus importante.
N’étant pas habitué à cet environnement urbain, il était incapable de garder son calme adoptant un comportement de peur si élevé qu’il en venait à s’immobiliser (pour ne pas dire se tétaniser) rendant impossible la continuité de la promenade.
Avec un peu de recul, son fonctionnement relevait d’une logique imparable.
Pourrait-on demander à une personne arachnophobe de prendre une mygale sur ses genoux, alors qu’elle ne se risquerait déjà pas à s’approcher d’une araignée minuscule…
Donc pas évident me direz vous de tracter un loulou de 45kg quand il refuse de bouger .
Maintenant imaginez ce même chien bondir et tenter de s’enfuir car un enfant s’est mis à courir un peu trop prés de lui.
La scène s’apparenterait à celle d’un skieur nautique tracté par un zodiaque de 200 chevaux !
Bien que certaines situations puissent devenir folkloriques et faire sourire, rappelons qu’un chien ne pouvant s’adonner aux ballades sereinement et s’acclimater à l’environnement qui l’entoure, est plongé dans un état important de souffrance psychologique.
Ce trouble de comportement est appelé syndrome de privation sensoriel.
Il résulte d’une différence entre le niveau de stimulation rencontré dans le milieu de développement de l’animal (ici l’élevage), et celui correspondant au milieu dans lequel il va vivre.
Cela génère des situations de stress quand l’animal rencontre des stimuli auxquels il n’aura pas été habitué durant les premières semaines de sa vie.
Après avoir revu l’ensemble du système relationnel de Junior avec ses propriétaires, et au terme de plusieurs promenades éducatives, Junior a pu surmonter ses peurs et élargir sa zone de confort.
Aujourd’hui, grâce à l’implication de propriétaires dévoués, et d’une meute de 4 autres chiens, notre ami Mr Ju’ (comme sa propriétaire aime le surnommer), semble couler des jours heureux, et profiter d’un bonheur qu’il a bien mérité.
Ils peuvent donc s’en féliciter, et évidemment, lui aussi.
Il rencontrera certainement d’autres difficultés, et c’est bien normal, car la vie est un apprentissage permanent…